La photo de nu est donc un arrêt sur l’image : on a interrompu le défilé des images, on a épuisé toutes les possibilités d’arrangement du corps dans son espace, les distances que le regard aura à parcourir pour arriver au contact de la femme nue, les capacités d’éclairage et l’incidence de la lumière, la mise en évidence des volumes du corps (on y reviendra aussi), tout est donc dit, on arrête tout. Et on prend la photo. Elle est faite.
Eurydice a disparu, la femme de Loth est devenue un rocher parmi les autres, l’aventurier anonyme qui voulait braver Méduse est retourné, lui aussi, au règne minéral…
La femme qu’on photographie nue est donc symbole :
de beauté, on l’a vu ; de lumière et de volume ; et aussi de temps suspendu.
Autre chose encore, que la photo de nu ne réalise pas toujours : ses symboles ne contiennent jamais l’idée qu’il y a dedans, à l’intérieur du corps ainsi regardé, un sexe, une fente, l’entrée du corps sexuel de la femme.
La photo de nu est le contraire de la photo de sexe : le nu, c’est la forme et c’est une forme qui parle. Le sexe représente l’informe et l’informulation : il est opaque et muet, a-symbolique. Le nu est séduisant, beau, il attire la lumière et il tire l’oeil, alors que le sexe est obscène et répulsif.